31 décembre 2023

Le voleur de virages

 

Le voleur de virages

 
Comme bien des crimes, celui-là comporte son lot de circonstances atténuantes.

Le voleur était en manque de virages dans la poudreuse. Il n'avait qu'une petite heure pour en trouver avant de repartir vers un Montréal sans neige. Et comment résister quand on voit par le fenêtre une de ces occasions qui fait le larron? 

L'occasion était une colline boisée située au sud du village de Sacré-Coeur sur la Côte-Nord. Une colline avec au sommet un chalet sortant de la forêt. Une forêt qui devait forcément cacher un chemin montant vers le chalet. Un chemin sur lequel venait de tomber une douzaine de centimètres de belle neige poudreuse. 

Comme bien des voleurs, celui-là a pris peu de précautions. En plein jour, vêtu d'un voyant chandail de laine rouge, il a pris le champ derrière la maison où il avait passé la nuit. Et en laissant des empreintes de ski derrière lui, il a rallié le pied de la colline et trouvé l'entrée du chemin qui monte dedans. 

L'entrée était défendue par une barrière de métal. De l'autre côté, le chemin était gorgée de belle poudreuse vierge. Le voleur a vaincu ses derniers scrupules en se disant que la barrière était là pour décourager les intrus à motoneige plutôt que lui et ses deux glissants complices. Il a contourné la barrière, s'est introduit dans la colline. 

Le chemin montait en décrivant une longue courbe. Le voleur l'a suivi jusqu'à ce qu'il se bute à une autre barrière. Derrière celle là, il a vu le chalet perché sur la colline qui l'avait attiré jusque-là. 

C'est là qu'il a tourné les talons au lieu aggraver son cas en poussant jusqu'au chalet.

Le vol qu'il était en train de commettre est un crime qui s'apparente à l'enlèvement. On prend d'abord en otage des mètres d'altitude. Puis on les échange contre une rançon de virages. 

Le voleur avait gagné 75 mètres d'altitude qu'il aurait pu échanger d'une traite. Il a préféré stopper trois fois sa descente pour admirer son butin: ces virages qu'il laissait derrière lui dans la neige... mais qu'il emportait aussi gravés dans sa mémoire et celle de son téléphone

Son crime avait payé quand il est sorti du bois. Il ne lui restait plus qu'à prendre la fuite à travers champ. 

Depuis, il a appris que le propriétaire du lieu de son crime s'appelle Rosaire. Il ne lui demande pas pardon. Mais il lui promet de ne pas récidiver sans lui demander sa permission.

Le village de Sacré-Coeur vu du champ que le voleur a traversé.

La colline où le crime a eu lieu

Une part du butin du voleur...

Une autre part du butin du voleur.

On a affaire à un voleur assez stupide pour se photographier en plein méfait!

1 commentaire:

Anonyme a dit...

Toujours excellent ! Merci pour vos textes. Vive la neige !!