06 décembre 2019

Un cimetière sous la neige

Un cimetière sous la neige

J’étais parti pour éclaircir un mystère.

Que pouvait bien être l'étrange clairière que j’avais aperçue en pleine forêt au nord de Sainte-Agathe, en survolant le secteur sur Goggle Maps?

Cette question avait commencé par me mener à hôpital de Sainte-Agathe.

Depuis des décennies, cet établissement grossit comme une tumeur au flanc d'une colline. Mais derrière, c’est encore la forêt. Une forêt où courent des morts-vivants.

Non, pas de zombies échappés de l’hôpital. Plutôt des sentiers sauvages à la fois morts et vivants. Morts parce qu’ils ont déjà fait partie d’un défunt réseau de pistes de ski de fond. Vivants parce qu’ils sont toujours fréquentés par les habitants du coin.

Un de ces sentiers part de la rue où se trouve l’hôpital. C’est là où j’avais pris la neige dans l’espoir de trouver mon chemin jusqu'à ma mystérieuse clairière.

Entre temps, je faisais du bon ski. Le sentier montait dans une colline, redescendait de l'autre côté jusqu’à une petite rivière qui étincelait dans son écrin de neige.

Je ai bu des yeux la rivière en la traversant par une étroite passerelle en bois. Puis j’ai pris un sentier qui s’enfonçait dans le flanc d’une autre colline.

Je remontais la bonne piste, me rapprochait de la clairière, et du moment où j’allais éclaircir mon mystère.

Une haie bien entretenue. Un portail en fer. Une grande croix en bois. Parti d'un hôpital, j'aboutissais à un cimetière. Protestant. Entouré d'une épaisse forêt. Raccordé au reste du monde par un chemin qui reste enneigé durant l’hiver.

Mystère résolu, donc.

Mais au lieu de repartir, je suis entré sur la pointe des skis dans l’enceinte du cimetière. Et j'ai déneigé une pierre tombale au hasard. 

«Graham Norwell. Artist and Painter.»

C’était un autre mystère.

Celui-là je l’ai éclairici en faisant une randonnée sur Internet.

Graham Norwell est né en Écosse en 1901. Il a immigré à Montréal avec ses parents à l’âge de 14 ans. Il a étudié les arts à Toronto et en Europe. Il a vécu à Val-David de 1933 et 1943, et c’est là qu’il est mort en 1967.

L’artiste avait une spécialité: les paysages d’hiver. Et il a beaucoup peint les Laurentides. Surtout des maisons qui reposent en paix sous la neige.

Maintenant c’est lui qui repose en paix dans les Laurentides. Je ne pouvais tomber sur meilleur homme dans un cimetière sous la neige.

J'ai croisé plusieurs vieilles balises pendant ma randonnée.
Et j'ai skié sur une passerelle munie d'une rampe.

Le chemin du cimetière sous une lumière divine.




1 commentaire:

RENAUD Gravure a dit...

Quel beau texte, à la fois poétique et mystérieux ! Il y a quelque chose de fascinant dans l'idée d'un cimetière enneigé, un lieu de mémoire figé dans le temps.

Cette atmosphère me parle particulièrement, car je réalise des gravures d'art sur granit pour plaques funéraires. Chaque portrait que je grave est conçu pour traverser les années, tout comme ces pierres tombales qui gardent les traces du passé sous la neige. Si jamais vous souhaitez découvrir ce travail d’orfèvre, je vous invite à visiter mon site : Plaques funéraires avec photos