J'avais perdu espoir quand j'ai trouvé ce que j’étais venu chercher.
Une vieille balise rouillée. Un losange rougeâtre que j’avais cherché des yeux dans bien des arbres avant celui où elle m'attendait depuis des décennies.
J’avais travaillé fort pour en arriver là.
D’abord sur mon ordinateur. Pour localiser un bout de sentier qui, selon ce que j’avais entendu à travers les branches du web, avait déjà fait partie de la Maple Leaf - la mythique piste de ski tracée dans les années 30 par Jackrabbit Johannsen à travers les Laurentides.
Ensuite sur le terrain. Pour réussir à poser mes skis dans ce bout de sentier situé en territoire hostile.
Rien de moins qu’un quartier résidentiel de Sainte-Anne-des-Lacs défendu par un règlement municipal interdisant le stationnement sur rue.
Mais j’avais trouvé un point faible dans ce système de défense: le stationnement de la bibliothèque municipale.
Mon plan: abandonner ma voiture à la bibliothèque, faire une marche d’approche d’un kilomètre avec mes bottes de ski aux pieds et mes skis sur le dos, vite prendre le bois avant qu’un résident me dise d’aller jouer alleurs.
Ce n’est jamais facile de faire la chasse à la vieille balise. Il faut ralentir l’allure, regarder haut dans les arbres, combattre l’envie de regarder où on mets les skis, et surtout avoir de la chance.
Le sentier serpentait entre deux rangées de maison, puis en forêt vers un lac et le sommet du mont Avila. Il était bien dégagé, agréable à skier après le passage d’un ou deux raquetteurs.
Mais j’étais arrivé à sa fin sans arriver à mes fins. Et j’avais rebroussé chemin en ruminant le mot «bredouille».
Mais une vieille balise que j’avais manquée à l’allez se trouvait sur chemin du retour. À quelques centaines de mètres de mon point de départ. Et cette fois j’ai eu de la chance.
La chance de lever les yeux là où Jackrabbit Johannsen avait levé les siens des décennies auparavant.
La chance d’apercevoir une relique accrochée à un arbre qui lui avait fait gagner de l’altitude en poussant.
Le losange de métal était trop rouillé pour que je puisse être certain d’avoir trouvé une balise de la Maple Leaf. Mais elle avait la bonne forme, la bonne couleur. Et elle était assez vieille pour avoir encaissé quelques attaques à mains armées au temps où on avait la gâchette plus facile qu’aujourd’hui.
Je l’ai contemplée. Je l’ai photographiée. Puis je lui ai dit adieu en me disant que je n’allais peut-être jamais repasser par ce bout de sentier cerné par la civilisation.
J’espère qu’elle est toujours là à attendre son prochain découvreur.
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Le secteur tel qu'il apparaît dans l'édition 1940-1941 du Sweet Caporal Skier's Book. |
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Le même coin sur Openskimap de nos jours. |
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J'ai commencé ma randonnée dans un sentier vierge de trace. |
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Puis j'ai rattrapé des raquetteurs. |
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Une petite pente où j'ai pu faire quelques virages. |
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Ça paraît pas dans ma face, mais j'étais content. |
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Une autre relique que j'ai croisée au sommet du mont Avila. |
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Toujours agréable de passer par le sommet d'un centre de ski alpin |
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Ma vieille balise telle que je l'ai laissée dans la forêt. |
Bravo et même si ta face ne semblait si fier d’avoir trouvé ce que tu cherchais, je présume que tu devais être très heureux ! A la prochaine
RépondreEffacerMr Fortin. J'aime toujours lire vos récits d'aventure. On voit bien que vous êtes un professionnel de l'ecriture.
RépondreEffacerFière de vous! De reprendre connaissance de notre patrimoine de piste
RépondreEffacerMerci Barclay pour ton travail. Un jour, le Maple Leaf sera skier d'un bout a l'autre.
RépondreEffacerMerci tout le monde pour les bons mots!
RépondreEffacerBF